Missive

Cher toi, 

 

Je te remercie pour ta missive qui m'est parvenue dans des plus brefs délais. Moins d'une semaine, c'est un record pour notre porteuse bien méritante qui déjà dans le passé a fait ses preuves dans les sauts de relais entre nous. Ça se confirme, tu es tombé dans une bonne maison, malgré que tu te plains de ne pas avoir assez de caresses. C'est toujours mieux qu'avant. Que j'étais malheureuse quand tu as quitté le refuge. Je m'étais habituée à ta présence rassurante. Une année à barouder ensemble plus quelques mois enfermés. On était dans la mouise mais heureux d'être encore proche. Oui, ta nouvelle habitation t'a isolé de tes congénères. La meilleure des places n'est pas parfaite. Je me souviens de ceux qui sont venus te chercher, et j'ai cru à un moment que ça serait moi. J'ai tout fait pour me faire remarquer. Mais sans doute trop agitée, trop fougueuse et jeune. C'est toi qu'ils ont choisis. C'est bien pour finir sa vie de chien errant, au chaud, tranquille, la gamelle pleine, un vieux chat comme copain qui essaye de te piquer ta place au coin du feu, un jardin à toi tout seul. Je te vois bien dans une maison proprette, pépère pour finir tes jours avec des maitres attentifs. Je suis sûre qu'ils t'on mis un collier avec ton petit nom « Terence ». S'il savait qui tu étais avant : « la vielle tête brûlée de la SPA ».Je comprends que tu souhaitais décrocher de ta vie d'avant. Là où tu es maintenant, es bien mérité, après toutes tes aventures. Comme on dit un repos bien mérité. A la SPA, ils étaient sympas, on avait des caresses tous les jours. Tous chouchoutés comme il faut pour vivre dignement. Souvent tu divaguais sur un monde meilleur et tu me remontais le moral quand à mes frousses pas possible. Je n'oublierais jamais comme tu as cru en moi et que tu me disais que les peurs ça s'apprivoisent une par une  : « allez ne te laisse pas impressionner, lève la truffe et regarde le ciel, renifle l'air pur et hurle à la vie ». Et tu avais raison, car je crois que c'est mon cri qui a attiré mon maitre. Il est venu juste avant la fermeture du refuge à la nuit tombante, là où j'ai des angoisses, et je suis maintenant adoptée. Il a pris mon mugissement pour de la vaillance. S'il savait qui j'étais avant : « Winny, la froussarde ». Je ne veux pas le décevoir, il est sympa ce type. Je ne dirais pas que c'est mieux qu'avant. Le meilleur se crée par étape. Je suis souvent enfermée. Mais je me contente de ce qui est là. Je rêve aussi de caresses. Par contre, je lève souvent la tête au vent et puisque je dors dehors, je le vois souvent le ciel. Les étoiles sont belles , elles me font des clins d'oeil, comme tu me faisais. J'ai souvent le vague à l'âme pour un monde meilleur. J'hurle à la vie, malgré que je cours pour la mise à mort. Les chasseurs sont des bestioles étranges. Mais mon maître est rassurant avec moi. Je suis bien équipée pour qu'il me retrouve, j'ai un GPS intégré à mon collier. Tu peux être fière de moi car je suis à la bonne école pour apprivoiser mes peurs. Une à une, j'e m'étonne moi-même. Celle qui me terrifie chaque jour de chasse c'est la peur de mourir d'une balle. Je porte une clochette mais je me demande si c'est suffisant, car ça arrive qu'ils se tirent dessus entre eux. Donc voilà de mes nouvelles, tu me manques et je pense souvent à toi.

 

Avec affection 


The end

Un air frais de fin d’hiver, vue plongeante dans une chambre d’Ehpad. Rien … pas de bruit … un silence aigre plane dans la pièce … tout est vide de vie, de sens, de sons … rien plus rien ne retient celle qui était dans son fauteuil …. Elle a rejoint son lit-berceau …. plus rien à attendre. 

Le bruit de fond de la télé n’est plus. Tout s'est tu autour d'elle. De toute façon , elle n’y comprenait plus rien à ce qu’il disait dans le poste. Cette bonne copine, qui jusque-là remplissait le vide, l'a laissé en berne. Quelle guigne ! Elle s'est mis à parler bizarre. Des mots à dormir debout : rançongiciels, démocrature, remontada, fichés s, boboïsation, googliser, taser, télétravail, flexitarien, solastalgie, antivax. Alors, elle a décidé de prendre la clé des champs. En quittant ses pantoufles, elle sait qu’elle ne remettra plus les pieds sur cette terre :« Ils ne pousseront pas mémé dans les orties ». Plus rien ne la retient ici-bas. Les siens ne viennent plus. « The End », la petite boîte de gâteaux sortie du buffet, la soupe toujours prête sur le poêle pour les revigorer. Parfois ils sont là derrière une vitre, ils lui font des signes. Leurs visages n’existent plus. Ils sont obligés de parler fort pour compenser l'inconsistance de leurs bouches. Tout devient incompréhensible, tout s'émousse. On lui met aussi ce truc sur le museau. Ils parlent le même galimatias qu’à la télé. Des mots à pisser dans un violon. Fatiguée d’entendre toutes ses fariboles, elle s’est allongée après avoir redonner de la plume à son oreiller. Lasse de la vie « sous covid » comme ils disent, plus rien ne lui donne envie de rester. Un petit dessert la rassure peut-être parfois dans ce grand désert affectif. Les liens sont réduits à rien. Même la poussière ne vient plus se poser sur les faux meubles. L'artificiel chasse tout. Son lit à remontée mécanique est son dernier refuge. Les souvenirs ont aussi quitté les lieux. Elle a débranché sa tête. Seul son cœur pulse la fin. Les derniers regrets d'une vie meilleure viennent de s'envoler. Elle peut foutre le camp. Pour elle tout est ok. Elle sort du pétrin.

 


Pas encore "The end"

Elle est sortie du pétrin. Pour elle, c’est tout ok d’avoir quitté ce gros bordel. Le miroir de l’illusion s’est brisé. Elle se sent plus légère, moins lasse. Elle a laissé sa vieille carcasse. Elle s'est échappée de cette morosité étouffante. Pourtant c'est pas le paradis ici ! Pour sûr, une vue plongeante sur le monde. Elle se sent privilégiée de cette lucarne entrebâillée. Elle contemple et comprend tout ce qui était caché de son existence. Elle en prend plein les mirettes. C'est son heure de vérité.

Elle se souvient qu'elle avait sombré dans l'indifférence et qu'il lui restait seulement un présent maussade dans sa chambre d'Ehpad. Elle se souvient qu'elle regardait le ciel plein d'espoir. Des visages familiers se dessinaient et comblaient le vide des heures. Illusions d'horizons meilleurs que les conneries ambiantes. Les oreilles bouchées, elle se sentait plus en sécurité. Mais maintenant, sans l'ombre d'un soupçon elle voit tout clairement. Les souvenirs reviennent. Ils sont là bien présents, intacts comme au premier jour. Elle se souvient de tout. Des chemins tout tracés de la femme qu’elle était. Des tentatives pour s’émanciper et échapper au destin des femmes de sa famille. Des fantômes qui l’ont rattrapé et agrippé à la ceinture, l'empêchant d'avancer comme elle le voulait. Des pers qui lui ont crées une vie complètement à côté de la plaque. Si elle avait eu le temps de rêver enfant, sa condition aurait changée. Mais là à cette époque, des bombes lui tombait sur le coeur et il fallait se protéger de la folie des hommes. Refuge à la campagne, des heures lumineuses dans sa vie de môme. Elle avait plus le temps de regarder le ciel et contempler l’infini pour inventer une autre destinée. Une vie simple et pleine de cohérence avec la terre. Et puis se sont enfilées de nouvelles entourloupes. Elle est tombée dans le panneau des duperies et impostures. Foutaise de propagande. Les illusionnistes pourrissent ce monde. 

De sa lucarne, elle voit tout, elle comprend tout. Les mystères sont percés et une autre vérité lui saute à la gueule. La terre s 'en fout des hommes ! Elle continue de tourner. Elle fait son petit bonhomme de chemin à travers le cosmos. Rien ne l'arrêtera ! La cruauté, elle la mouline à chacune de ses révolutions. Elle se fiche que les hommes marchent sur la tête. Elle trace sa route. La médiocrité sur le dos, la terre continue d'appartenir à l'immensité. 

Elle ferme la lucarne. Elle a enfin les yeux grands ouverts. Elle peut maintenant vraiment rendre son tablier et prendre la poudre d'escampette. Dans le sillage de la terre, elle va de l'avant, suit le sens du courant et dans une poussière d'étoiles elle reprend sa place dans le cosmos. Sans l'ombre d'un soupçon elle est revenue à la maison.

 


Vieillerie

Elle est d'humeur massacrante. Elle ne veut voir personne. Elle est seule et s'enferme dans sa solitude. Rien ne tourne comme elle veut. Elle perd la tête et envoie balader tout le monde. Elle sent bien qu'elle n'ira plus très loin, elle y va tête baissée, le diable la pousse à s'en foutre : 

« je m'en fous, j'irai en enfer et j'en ai rien à faire ! ». C'est sa nouvelle devise. Elle va la mettre sur sa pierre tombale. Pourtant la vie est bien morne : passage des aides soignantes, petites courses en twingo, un horoscope à lire. Le sien seulement, parce que les autres « je m'en fous ! » . Enfin libre de le dire en grande gueule. L'avantage de la sénilité. On pourra lui pardonner. Avant elle passait pour une égoïste. Elle aurait aimé être une humaniste. Effluve d'une idée fugace. Libre d'envoyer C H I E R le monde : « aux infos, ils nous bassinent de conneries, mais j'y crois quand même ! Ça me rassure de voir qu'autour de moi ça s'effondre comme je m'effondre. AH AH ! un vrai bordel, une déroute … rien à foutre. L'humain est une espèce en voie de disparition. Le diable est là, on est plein à tomber dans le panneau, plus que ça, à sombrer dans le chaos . OH OH ! que ma chair exulte dans cette chute ! ». Heureusement qu'il y a les mots fléchés, ça la rassure. Elle met des lettres dans des cases. Elle range tout bien. Ça lui donne l'illusion d'un ordre dans tout ce chaos. 

«Rien à foutre » . L'enfer est depuis toujours le royaume de la terre. Et pourtant elle y a cru à cette magnifique société de consommation. Elle a couru comme tout le monde dans les grandes surfaces. Elle a tout misé sur son médecin. Maintenant elle est complètement dépendante : « c'est rassurant de prendre mes médicaments. » Son humeur massacrante règne en maître sur son monde intérieur, ça la rassure : « y'a plus rien à faire, je suis en enfer ! » Et mon humeur d'un monde meilleur : « Tu sais où je me la fous ! ». Je remballe mon sourire, ferme la porte, à la recherche d'un ailleurs certainement meilleur ...

 


Malaisance

Pas de mots pour le dire, je préfère garder le silence. Et puis, devant l’intolérable, il faut aussi ne plus se taire et trouver vocabulaire pour exprimer au plus près ce que nous inspire le théâtre du monde : une mauvaise pièce, un casting pourri, des méchants vraiment méchants et des gentils hésitant ou résistant.... dégoûtée mon humeur d’un monde meilleur risque d’être amère. Les mots manquent à cette humanité en déroute. 

Je fais partie des gentils qui préfèrent se taire, qui ne savent pas quoi faire. Simplement observer et attendre le moment opportun pour agir. Ou rester là, planté, pétri d’inconfort. Je suis encore sans voix quand la terre a tremblé ... étrange sensation d’une terre vivante, vibrante sous nos pieds. Cette nuit-là, ce n'était qu’un doux bercement ... rien de fracassant comme le tremblement de l'année d'avant. Bien réveillée, ma pensée s'est accélérée. Certainement elle s’est égarée dans mon désir de bonheur pour l’humanité. J’ai vu clairement l'ancien monde d'intérêts égoïstes et de nationalisme s’effondrer. J'ai vu des idées progressistes s'éveiller partout sur terre. Mais j'ai vu aussi nos peurs se cristalliser en nous, nous rendant encore plus hermétique à de nouveaux chemins d'évolution. Mon désir de bonheur a pris du plomb dans l’aile. J’ai vu des corps se raidirent et des pensées se scléroser sur de vieux schémas de colère tournant à la violence. J'ai compris que l'évolution se passe d'abord à l'intérieur de nous. Le grand R de révolution viendra par l'éveil des consciences individuelles. Les premiers combats à mener sont d'abord contre nous-mêmes. Nos colères personnelles refoulées et nos dépendances sont nos premières ennemies. Sortir de la soumission, c'est d'abord dire non à ce qui nous soumet à l'intérieur de nous. L'insoumission engendre naturellement de prendre soin de nous, et de là naîtra peut-être la véritable paix. 

 


Constance

Les yeux de Constance brillent au soleil. Assise sur un mur de pierres sèches, elle contemple la vallée de son histoire. Elle profite du soleil quand il est là. Et quand il pleut, elle danse Constance. Elle met du soleil dans sa maison avec un air d'accordéon : « pardi la lecture n'a jamais été mon fort. La télé, je la zappe comme diraient mes petits enfants ! » Elle se fie plus aux oiseaux, qu'aux infos. D'un revers de la main, elle balaye Paso Doble et Tango : « pfff ! Ces danses de nos jours ne valent pas la bourrée de nos campagnes ». elle les trouve ridicules et sans intérêt. Elle préfère taper du pied, que taper du poing sur la table. Ce sont les bons à rien qui moulent du mauvais grain en criant plus fort que leur moulin. Elle aime le silence des tendres, pas celui des gens qui n'osent pas dire le fond de leurs pensées : « ceux là, mieux vaut pas qu'ils ne croisent mon regard, je les clous sur place jusqu'à ce qu'ils soient correct avec la vérité ». Elle n'a pas de devise. Elle n'ira pas au cimetière comme ses ancêtres. Pas de pierre tombale. Elle sera la première aïeule à se faire incinérée : « c'est moderne ça ! » Les cendres iront dans son jardin. « La vie , la mort ça doit être simple » Pas la peine de se mettre la rate au court bouillon dira t-elle en souriant aux corneilles. Le silence est d'or dans notre conversation. Elle pétille au soleil, et c'est un vrai plaisir de se retrouver là. Ce jour, mon humeur d'un monde meilleur est à portée de main. Une main tendue vers l'horizon : « tu vois là-bas, cet arbre, avant j'y montais. Maintenant, je reste à terre, mais je m'envoie en l'air juste avec ce qu'il y a dans ma tête et dans mon cœur ».

 


Au secours !

Mon humeur sera aujourd'hui un cri de ralliement comme on pousserait un cri de guerre dénué de colère. Un son qui résonne comme une onde vibratoire et mettrait en mouvement toutes les particules lumineuses dans l'atmosphère. Parce que, ce qui se passe à l'échelle mondiale est tellement d'une énormité sans nom que même la colère, la haine ne mèneront qu'à renforcer cette grande imbécillité théâtrale. On est toujours le con de quelqu'un, ce qui fait que nous soyons des milliards de cons sur terre. La connerie se cristallise à l'heure actuelle pour laisser transparaître la possibilité de mutation lumineuse des sombres forces en agonie.

Mon papier ne changera rien, seulement des mots emprisonnés dans ma tête que l'écriture sans censure permet de libérer. Peut-être délivreront t-ils une once de votre fureur pour en faire une lueur d'espoir d'un monde sans mouchoir. Hurler de douleur, pleurer pour s'arracher du malheur, crier son impuissance ... Difficile de faire autrement quand nous faisons partie de cette aventure humaine. La souffrance sourde dans le cœur des humains. Je regarde et souffre de cette grande comédie dans tout ce qu'elle induit d'absurdités et de grotesqueries. Il faudrait inventer tout un vocabulaire pour nommer ce chaos infernal, ce grand n'importe quoi, ce bazar loufoque, cette juxtaposition d'incohérences d'une ampleur démesurée. Les journalistes ne s'en privent pas quand ils parlent d'ère macronnienne ou de jupitérisme, dans leurs pleines pages remplies d'évènements phares. Les lanternes se font vessies, les balivernes vomis. Nous ne sommes plus dans la clownerie mais bien dans la clowne – risquerie tellement les forces politiques jouent gros à l'abri de leur pactole et assurance vie. Les grands illusionnistes loufoques s'affublent de traversées funambulesques au risque et péril d'écraser sous leurs grotesques derrières, les plus fragiles, ceux qui souffrent de se battre pour un monde meilleur. L'enfermement est là en prémisse aux prises de conscience que « l'enfer me ment ». Oui l'enfer crée par le pouvoir en place nous ment. Devenons les Don Quichotte des illusions du capital , pourfendons les discours mensongers par des actions concrètes de solidarité. Ouvrons nous à la générosité. Car si tous les humains sont reliés comme des cons, que le lien qui les rassemblent soient la voie d'un destin solidaire. 

Je pleure toutes les larmes de mon corps. Je fais seulement le souhait qu'elle puisse arroser les graines de l'espoir.

 


Détresse

Le temps passe, les jours s'égrènent, et on met à profit cette longue traversée vers un monde meilleur. Les enfants jouent sur le ponton. Ils s'agitent un peu et espèrent entrevoir des dauphins. Ils pourraient sans doute comprendre leur détresse. Les mères mettent à profit ce voyage pour leur distiller les vertus de la patience et de l'espoir. Elles passent du temps avec eux. Elles les massent de toute leur tendresse. Rien ne presse. Pas de débarquement, pas d'escale, juste voguer sur les flots. Sur le ponton, une maman parle doucement , ses enfants en face d'elle se noient dans son regard et boivent sa sagesse . 

Un air de comptine résonne dans la bise marine : 

 

Bateau sur l’eau, l'Aquarius, l'Aquarius, 

Bateau, sur l’eau, l'Aquarius erre dans l'eau. 

Migrants dans l’eau, pas de vaine, c'est la haine, 

Migrants dans l’eau, âme en peine au fond de l’eau. 

Espoir nouveau, roule vague, roule vague, 

Espoir nouveau, roule vague, espoir sous l’eau. 

Puissants là-haut, sans partage, les sauvages, 

Puissants, là-haut, les puissants tombent dans l’eau. 

Le bateau va accoster et nous serons peut-être sauvés... 

 


Save the world

A l'heure où volent les pavés dans les gueules, les fleurs sont des ovnis anachroniques se balançant entre ciel et terre. Ici, le cri des optimistes retentit. Ils se rassemblent autour d'un « mieux vaut tard que jamais ». Ils se parent de couleurs et appellent la diversité en leur essaim. Là, folies passagères et ultimes sursauts d'un monde périmé, de certains qui croient que les assauts de pouvoir devraient asseoir sur un trône fantomatique des tétons d'un monstre du passé. Le bordel appelle des bols d'air. Le peuple happe la liberté à bras le corps. La solidarité se fortifie. Pourtant au loin, des cris s'étouffent dans les gueules des chiens hurlants. Ailleurs, ça consulte et ausculte, évalue et prend le pouls du peuple. Là-bas, ça se cherche les poux. Ça râle, ça se met en pétard, parce que ça pense qu'il faut tout mettre en l'air. Les héritiers de Souvarine (Germinal) manifestent leur force comme audace des hommes nouveaux. Le néant d'abord. Le sang abreuvera la société nouvelle. Tout détruire pour reconstruire : quand il ne restera plus rien de ce monde pourri, peut-être en repoussera-t-il un meilleur.

Pourtant les fleurs ça fait du bien au cœur. Ça embaume l'air ambiant. Celles des champs, celles en bouquet, celles en huile essentielle ou en élixir. Tout cela fleure la promesse de douceur et d'un nouveau bourgeonnant. Je sens l'air s'embaumer du rameau d'olivier de la colombe. Je tourne mon regard vers le bleu du ciel. Face aux crachats du réel, l'impertinente Maya L'abeille me chuchote à l'oreille que je devrais bien plus poser de questions qui dérangent le monde postiche des grands. Ses « pourquoi » innocents devraient s'inviter sur la scène politique . Au lieu de répondre à des questions toutes faites, pourquoi ne pas poser des questions de « pourquoi » : Pourquoi des règles et des lois qui empêchent d'être libre ? Pourquoi les gens doivent ils faire un travail pour gagner de l'argent ? Pourquoi y a de l'argent pour faire la guerre et pas pour le climat ? Pourquoi on sait pas où va l'argent des caisses de l'état? Pourquoi on est sale avec la terre ? … Mille pourquoi peuvent s'enchaîner. Je souhaite retrouver cette fraîcheur face aux multiples clivages des ego qui veulent avoir raison dans les débats, qui disent avoir la solution. Moi je veux rêver de fleurs, de colombe et de paix. Mon bisounours sort de son hibernation. Il quitte sa retraite où il a eu le temps de rêver d'un monde meilleur. Ce n'est pas le ridicule qui nous tue mais bien la misère. La misère de passer à côté de nos vies. La misère de ne pas faire ce qui nous plaît, la misère de ne pas être cohérent entre nos pensées et nos actes. Je veux bien obéir à des règles, mais mon expérience m'a appris à discerner les intelligentes des idiotes. Je ne veux pas d'un monde qui marche sur la tête. Je rêve d'une Mary Poppins à l’Élysée, d'une Mary Poppins dans les cortèges. Je rêve, car les banques tuent mes anges. J'ai envie d'emplir le monde des essences du ciel.